La vie sociale nous aide à rester en bonne santé mentale
Une étude basée sur le projet SHARE montre que la vie sociale améliore à la fois la qualité de vie et les fonctions cognitives des personnes âgées.
(Novembre 2020) En raison du vieillissement de la population européenne et de ses effets néfastes tant sur les systèmes publics que sur l'individu, il est nécessaire d'acquérir des connaissances approfondies sur ce phénomène afin d'élaborer des stratégies innovantes pour en atténuer les effets. De nombreuses recherches ont examiné les facteurs biologiques et neurologiques impliqués dans le vieillissement cérébral. Cependant, les questions relatives aux facteurs psychosociaux ont souvent été négligées. La socialité et le statut socio-économique peuvent-ils expliquer la fonction cognitive ? Les différents types de groupes sociaux sont-ils associés à différents niveaux de satisfaction ? Le système de protection sociale contribue-t-il à la socialité de l'individu ? Les chercheurs Miceli, Maniscalco et Matranga ont tenté de répondre à ces questions dans leur étude récente.
Facteurs de protection contre le vieillissement cognitif
L'un des principaux effets du vieillissement est le déclin des fonctions cognitives. Bien qu'il ne puisse être évité, il peut être considérablement retardé grâce à des facteurs de protection. Parmi ces facteurs de protection, un mode de vie actif et participatif est de première importance. Cette idée est soutenue par le concept de "réserve cognitive", qui indique que le fait de s'engager dans des activités sociales peut constituer une réserve qui permet de résister aux changements cognitifs survenant à un âge avancé. Conformément à ce concept, une étude précédente a montré que les personnes qui se socialisent en dehors de leur cercle restreint en s'engageant dans des activités telles que le bénévolat, les cours de formation ou les visites de clubs, ont une meilleure perception de leur santé que les personnes qui ne se socialisent qu'avec leur cercle restreint. Il y a donc plusieurs raisons de penser qu'il existe un lien entre l'environnement social d'une personne et le fonctionnement de son cerveau.
Qu'est-ce qui constitue un réseau social ? Les auteurs approfondissent ce lien en divisant les réseaux sociaux en membres de la famille et amis, contacts dans le cadre d'activités de loisirs et contacts avec des personnes rémunérées, comme des entraîneurs ou des employés de maison. En outre, la taille (nombre de personnes dans le réseau), la proximité géographique et la proximité émotionnelle du réseau social, ainsi que la satisfaction à son égard, ont été mesurées. Ces informations, ainsi que des indicateurs socio-économiques, ont été extraites de l'enquête sur la santé, le vieillissement et la retraite en Europe (SHARE). Les chercheurs ont analysé les données d'environ 32 000 personnes âgées de 50 ans et plus provenant de douze pays européens, à partir de la vague 4 (2011) et de la vague 6 (2015) de SHARE.
Mesure des fonctions cognitives
Les capacités cognitives ont été mesurées en combinant deux tests de mémoire et une tâche exécutive. Pour les tests de mémoire, on a lu aux répondants dix mots courants et on leur a demandé de les rappeler d'abord immédiatement, puis cinq minutes plus tard. La troisième tâche consistait à nommer autant d'animaux que possible pendant une minute. Ces tests sont des moyens courants d'évaluer les capacités cognitives des répondants dans les enquêtes scientifiques et ils sont sensibles aux effets de l'âge, montrant un déclin constant tant chez les répondants en bonne santé que chez les répondants souffrant de la maladie d'Alzheimer.
Une vie sociale active prévient le déclin cognitif
Une vie sociale et participative (entendue comme la satisfaction de son réseau social et l'engagement dans des activités sociales non professionnelles diversifiées) semble jouer un rôle crucial dans le maintien des fonctions cognitives. Parmi les personnes interrogées, le type de réseau social le plus répandu est le réseau familial de petite taille. Cela peut expliquer la satisfaction généralement élevée à l'égard de leurs réseaux sociaux, puisque l'analyse a montré que plus le réseau social d'une personne est petit et proche, plus elle en est satisfaite. Même les réseaux de type familial avec un seul ami laissent la personne plus satisfaite que les réseaux externes ou payants. En outre, plus une personne est satisfaite de son réseau social, plus elle considère que sa santé est bonne et plus sa qualité de vie est élevée. En outre, il a été constaté que les personnes vivant dans des pays dotés d'un système de protection sociale bismarckien sont moins actives socialement et plus susceptibles d'être insatisfaites de leur réseau social que les personnes vivant dans les systèmes de protection sociale socio-démocratiques de Scandinavie.
La prévention par la participation sociale
Suite à leurs conclusions, Miceli et al. suggèrent qu'"un mode de vie socialement actif et participatif atténue le processus physiologique du vieillissement cérébral". Ainsi, la présente étude soutient les approches de politique sociale qui encouragent la participation des personnes âgées à un large éventail d'activités, en particulier celles qui semblent être plus isolées socialement. En outre, des programmes de prévention précoces à l'âge adulte pourraient contribuer à préserver les capacités cognitives d'une personne et donc à limiter les dépenses de santé.
Étude réalisée par Silvana Miceli, Laura Maniscalco et Domenica Matranga (2018): Social networks and social activities promote cognitive functioning in both concurrent and prospective time: evidence from the SHARE survey. European Journal of Ageing, 1-10, doi.org/10.1007/s10433-018-0486-z.
URL: https://link.springer.com/article/10.1007/s10433-018-0486-z
Cet article a été traduit de l'anglais au français. Cliquez ICI pour le lire en version originale.
Photo : Unsplash / Philippe Leone